ENGRAIS POTASSIQUES. — Bien que la potasse soit très répandue dans toutes les terres cultivées, il arrive fréquemment
que cette base n'existe qu'en proportion insuffisante, surtout quand il s'agit
de végétaux qui en sont avides, tels que la vigne, les pommes de terre, les
betteraves, les plantes des prairies, les légumineuses notamment.En général, les terrains crayeux, les sols calcaires, les terres sableuses sont
pauvres en potasse, tandis que les sols argileux et granitiques en sont assez
pourvus.
La potasse étant énergiquement retenue par le sol, on peut l'enfouir par un
labour ou un fort. hersage avant les semailles.
Le chlorure de potassium est l'engrais potassique le plus répandu, mais il est
aussi le moins assimilable parce qu'il doit subir une transformation dans le sol
pour être utilisé par les plantes. Cet engrais n'est pas à recommander dans
les sols acides ou pauvres en calcaire. On doit le pulvériser très finement
avant l'épandage, s'il est pris en blocs sous l'influence de l'humidité. Il faut
éviter de le projeter sur les plantes parce qu'il peut brûler les feuilles.
Le sulfate de potasse est moins soluble dans l'eau que le chlorure de
potassium, mais sa potasse est plus avantageuse à prix égal et elle est
préférée par les légumineuses, la vigne, les pommes de terre, les betteraves.
Cet engrais doit être enterré à l'automne par un labour.
La kaïnite est un sulfate de potasse impur. Elle renferme 23 à 25
% de ce sel
mélangé avec du sulfate de magnésie, du chlorure de magnésium et principalement
du chlorure de sodium. C'est un bon engrais pour la vigne et les plantes des
prairies artificielles.
Les cendres renferment les matières fixes, entre autres la potasse que la
combustion ne volatilise pas comme l'azote ; elles représentent donc un grand
intérêt pour la culture ; mais les cendres lessivées ne renferment plus la
potasse qui a été enlevée par les eaux de lavage. C'est pour cela qu'il est
utile de recueillir les eaux de lessive pour en arroser le tas de fumier.
Chaux. — La chaux unie à l'argile et à l'humus, donne au sol un pouvoir
absorbant considérable. Elle empêche le chlorure de potassium et le sulfate de
potasse de devenir nuisibles en saturant leurs acides et en changeant leurs
alcalis en carbonates.
Utiliser de préférence des chaux grasses et comme pour la marne apprécier son
délitement. Tous les trois ans employer à l'hectare 12 à 15 hectolitres pour les
terres siliceuses ou granitiques ; 25 à 30 hectolitres pour les landes en
défrichées ; 18 à 25 pour les terres de consistance
moyenne ; 30 sur les terres argileuses fortes ; 30 à 40 sur les terres
tourbeuses et marécageuses.
Recouvrir chaque petit tas d'une couche de terre pour laisser le délitement se
développer graduellement. Procéder au début de l'automne par un temps sec.
Après une vingtaine de jours, on étend uniformément à la pelle et on enterre
avec la herse ou avec le scarificateur. Eviter de mettre la chaux vive en
contact direct avec les semences qu'elle brûlerait ; de même il convient de ne
pas la mélanger avec le fumier de ferme, le sulfate d'ammoniaque, les engrais organiques azotés dont elle favoriserait les déperditions
d'ammoniaque.
Le plâtre ou sulfate de chaux peut être considéré comme engrais et comme
amendement, car il est formé de chaux et d'acide sulfurique.
Le plâtre cuit est plus coûteux, mais il renferme proportionnellement moins
d'eau et plus de sulfate de chaux que le plâtre cru. On peut employer
indifféremment l'un ou l'autre. On donne la préférence au plâtre cuit lorsque le
transport est onéreux. Exiger la garantie en sulfate de chaux anhydre, car les
falsifications avec la chaux, la craie, la marne, les cendres ne sont pas rares.
Exiger une extrême finesse du plâtre moulu.
Le plâtre n'agit pas également sur toutes les plantes ; ce sont les légumineuses,
la vigne, les pommes de terre qui en profitent le plus, surtout dans les sols
riches en humus. Il n'y a pas avantage à répandre du plâtre sur les végétaux que
l'on destine à la production de la graine parce qu'il retarde la maturation à
cause de la végétation exubérante qu'il provoque.
On répand le plâtre en Avril-Mai, à la dose de 400 à
500 kilogs par hectare lorsque les jeunes feuilles commencent à pousser. On le
met en couverture par un temps humide (rosée) et calme. L'action du plâtre
s'exerce principalement sur la récolte à laquelle il est appliqué.
Les terres calcaires et les sols épuisés sont peu sensibles au plâtrage. Par
contre, le plâtre est excellent pour amender les terres fortes, froides, humides
et les terres des prairies artificielles. Il s'emploie plutôt seul, comme
la chaux.
Les considérations générales qui précèdent permettent
de donner des formules utiles. Mais il ne faut pas oublier que la nature
physique du sol, sa composition chimique, sa profondeur, sa perméabilité, la
qualité du sous-sol, les fumures au fumier de ferme, les exigences particulières
de récoltes, les cultures variées qui se succèdent, etc., sont autant de
facteurs importants qui peuvent modifier la formule de l'engrais chimique à
employer.
D'après M. V. Sébastian, qui a fait de nombreuses expériences sur les
diverses cultures, et en sol de composition moyenne, la formule d'engrais
qui donne d'excellents résultats sur les céréales — blé, avoine, etc. — est la
suivante (par hectare) :
400 k. superphosphate de chaux
90 k. sulfate de potasse
100 k. nitrate de soude
50 k. sulfate d'ammoniaque
On répand le superphosphate, le sulfate de potasse et d'ammoniaque au moment des
semailles et on applique seulement en couverture, au moment du départ de la
végétation, le nitrate de soude.
Cette formule convient aussi pour les prairies naturelles ou prés.
Pour les cultures fourragères, telles que luzerne, sainfoin, trèfle, la
formule suivante est à recommander :
500 k. superphosphate de chaux.
50 k. sulfate de potasse.
Un peu de plâtre en couverture, au printemps, complétera heureusement les
effets des engrais précités.
Sur les luzernes, l'application de la formule doit coïncider avec le moment où
l'on exécute les travaux culturaux d'automne et seulement la seconde année.
Pour les sols sablonneux dans lesquels on cultive la vigne, la formule suivante
est recommandée :
300 gr. de tourteau pulvérisé par souche.
50 gr. de superphosphate de chaux par souche.
30 gr. de sulfate de potasse par souche.
20 gr. de plâtre par souche.
Pour les terrains argileux, ou argilo-calcaires, ou argilo-siliceux, M. V.
Sébastian conseille :
50 gr. nitrate de soude par souche.
25 gr. d'ammoniaque ou 100 gr. tourteau.
30 gr. sulfate de potasse.
20 gr. plâtre.
100 gr. superphosphate de chaux.
Ces engrais doivent être appliqués à la fin de l'hiver, vers le mois de février.
Le superphosphate, le sulfate de potasse et d'ammoniaque peuvent être enfouis à
la fin de l'automne, mais les tourteaux, les nitrates ne doivent être employés
qu'au printemps peu avant le débourrement de la vigne.
Les engrais chimiques seront répandus très régulièrement et placés plus bas que
les semences, mais jamais en contact direct avec elles. Il est bon, pour
faciliter l'épandage, de mêler l'engrais à 4 ou 5 fois son volume de terre fine.
Certains engrais ne doivent pas être mélangés, non seulement pour éviter
des incommodités lors de l'épandage, mais surtout pour éviter des pertes de
matières fertilisantes.
Nous terminerons ces notions pratiques sur les
engrais par quelques formules susceptibles de servir de guide à la culture
maraîchère, suivant les expériences méthodiques de M. Sébastian :
1° Pois et
haricots.
Par hectare
600 k. superphosphate de chaux à 14-16%.
200 k. chlorure de potassium ou mieux sulfate
de potasse.
Mélanger et répandre en automne, en hiver ou au printemps. Enfouir à la
charrue ou à la bêche. On suppose ici que la fumure précédente fut faite au
fumier de ferme.
2° Toutes les variétés de choux.
Par hectare
700 k. superphosphate de chaux 15-18 %.
250 k. sulfate de potasse.
Fumer en automne, en hiver ou au printemps et enterrer aussitôt. Après la mise
en place, répandre 200 kilogs de nitrate de soude en couverture. Au bout d'un mois, donner encore
pareille dose de nitrate qu'on enterre par un binage, car l'engrais favorise la
formation de croûte a la surface du sol.
Il est recommandé pour tous les légumes d'éviter avec soin la projection du
nitrate sur les feuilles.
3° Carottes, navets, radis noirs, salsifis, raifort et plantes analogues
:
Même fumure que pour les choux.
Après le semis, répandre par hectare 150 kilos de nitrate de soude. On
renouvelle cette opération 25 à 30 jours plus tard.
4° Oignons, concombres, melons, tomates, aubergines, etc.
Par hectare
500 k. superphosphate de chaux à 15-16 %.
200 k. sulfate de potasse.
Enfouir à l'automne ou au printemps. Répandre 100 k. de nitrate dès la fin de
l'hiver. Couvrir et égaliser avec le râteau ou la herse. Quinze jours environ
après la levée répandre de nouveau avec soin, sans toucher aux plantes, 60 kilogs nitrate de
soude. Renouveler l'opération deux semâmes plus tard.
5° Salades.
Par
hectare
400 k. superphosphate de chaux à 16 %.
150 k. sulfate de potasse.
Cet engrais est répandu avant le bêchage. Puis en couverture sur le labour,
immédiatement avant la plantation, on sème 100 kilogs de sulfate d'ammoniaque à 2o-21 %. Quinze ou
vingt jours après la plantation, on peut| donner 50 kilogs de nitrate de soude
et on renouvelle cette opération 25 jours plus tard si la récolte dénote par son peu de vigueur qu'elle a besoin d'azote.
6° Asperges.
Les asperges aiment le terrain de bonne qualité, sablonneux, pas humide et
bien ameubli. Il convient de leur appliquer à l'automne ou au printemps :
Par hectare
500 k. de superphosphate de chaux à 16 %.
100 k. de sulfate de
potasse.
100 k. de chlorure de potassium.
Enterrer légèrement l'engrais par un binage. Lorsque les asperges commencent à
pointer, on répand 200 kilogs de nitrate de soude en couverture que l'on
recouvre légèrement. Renouveler l'opération un mois plus tard.
7° Fraises.
L'azote bonifie davantage le fruit que la potasse ou l'acide phosphorique et
contribue largement à l'exaltation de l'arôme.
Par hectare
200 k. superphosphate de chaux à 15-16 %.
100 k. sulfate de
potasse.
100 k. sulfate d'ammoniaque.
Répandre et enfouir à la fin de l'automne. Semer an printemps en couverture 250
kilogs de nitrate de soude que l'on recouvre légèrement. Renouveler l'opération,
si le besoin s'en fait sentir.
8° Arbres fruitiers.
M. Sébastian a démontré, à la suite de huit années d'expériences consécutives,
que l'azote est l'élément primordial de la multiplication cellulaire des
fonctions de reproduction. En l'absence de cette substance fertilisante, le
nombre des fleurs, et par suite des fruits, se trouve réduit.
La potasse, l'acide phosphorique, la chaux favorisent surtout la
consolidation des tissus et l'accumulation des réserves.